Favoriser l’accès au financement avec le Fonds Afro-Entrepreneurs
Février est le Mois de l’histoire des Noirs, l’occasion de reconnaître et de célébrer les contributions des Noirs à l’histoire, la culture et la société. L’occasion aussi de réaffirmer l’importance de la diversité pour nos organisations. Et à titre d’illustration, découvrez le Fonds Afro-Entrepreneurs, qui célèbre cette année son 15e anniversaire.
Pour soutenir l’égalité d’accès au financement des entrepreneurs issus des communautés noires, notre partenaire Filaction (fonds de développement créé en 2001 par Fondaction) a lancé en 2008 le Fonds Afro-Entrepreneurs.
Nous avons rencontré Jaël Élysée, directrice du Fonds Afro-Entrepreneurs, qui a grandement contribué à sa création.
Qu’est-ce qui a motivé la création du fonds Afro-Entrepreneurs ?
Dans les années 2000, les leaders des communautés noires ont fait part de leur constat ; bien qu’implantées au Québec depuis des années, leurs communautés continuaient de subir des problèmes de décrochage scolaire, de non-reconnaissance des diplômes, de chômage et d’accès limité au financement des entreprises. Ces leaders ont porté ce constat à l’attention du gouvernement provincial.
Une étude de la situation sur 2 ans a mené à un certain nombre de recommandations, dont la nécessité de mettre en place des actions pour stimuler l’entrepreneuriat des personnes noires, de créer des programmes d’accompagnement et de mentorat, ainsi que des aides à l’accès au financement de démarrage d’entreprise.
Filaction, qui avait déjà de l’expérience en création de solutions pour des clientèles qui n’ont pas accès à des fonds traditionnels, a alors été mandaté par le gouvernement pour mener à bien ce projet.
Le Fonds Afro-Entrepreneurs a ainsi été créé en avril 2008, avec un capital de 1 million de dollars. Des prêts entre 5 000 $ et 25 000 $ étaient accordés pour démarrer une entreprise, quel que soit le secteur d’activités.
Le fonds a beaucoup évolué depuis ! Si au début, les investissements sollicités se faisaient surtout dans des secteurs traditionnels comme l’ouverture d’une épicerie ou d’une garderie, désormais nous soutenons de plus en plus de projets en technologie et le profil des entrepreneurs s’est rajeuni.
Quels sont les objectifs de ce fonds ?
Les objectifs aussi ont évolué. Au départ, il s’agissait d’un fonds d’aide au démarrage d’une entreprise. Ce premier investissement facilitait notamment l’accès à d’autres sources de financement.
Au fil des ans, le fonds a élargi sa mission en ajoutant la possibilité de soutenir la croissance d’entreprises déjà existantes.
Ces entreprises, fréquemment démarrées avec des fonds personnels, sont bien souvent freinées dans leur croissance par manque d’accès à plus de financement. Le Fonds Afro-Entrepreneurs leur offre une aide financière, mais aussi de bénéficier d’un accompagnement.
Comment fonctionne l’offre d’accompagnement ?
Avec la pandémie, nous avons pris conscience que beaucoup d’entrepreneurs issus des communautés noires ne pouvaient pas bénéficier des aides du gouvernement fédéral, car leurs projets manquaient de structure et nécessitaient plus de formalisation pour répondre aux critères exigés. C’est ce qui a poussé le Fonds Afro-Entrepreneurs, soutenu par le gouvernement fédéral, à mettre en place une offre d’accompagnement donnant accès à des formateurs, consultants et autres experts dans tous les domaines qui touchent l’entreprise.
Quels sont les résultats obtenus jusqu’à présent par le fonds d’investissement ?
Depuis sa création, le Fonds Afro-Entrepreneurs a investi près de 5 millions de dollars, pour un coût total de projets de 12,5 M$. Il a accompagné près de 1000 entrepreneurs et a contribué à la création ou au maintien de plus de 500 emplois.
Il y a de très belles histoires, comme celle du Groupe Sidney. En 2010, un jeune couple est venu nous voir afin que nous les aidions à financer l’acquisition d’un centre d’hébergement pour personnes âgées. Nous leur avons accordé un premier financement de 25 000 $ qui leur a permis de solliciter un prêt bancaire. Nous avons continué à les accompagner dans leur croissance pour un total de 1,2 M$ d’investissements, et ils gèrent maintenant 5 résidences !
Un autre exemple est la compagnie Airudi fondée par deux experts en ressources humaines qui ont sollicité du financement pour développer des solutions logicielles pour l’optimisation de la gestion des ressources humaines. En l’espace de deux ans, ils ont embauché plus de 25 personnes et développent désormais leur activité à l’international.
Il y a aussi de plus en plus de femmes entrepreneures. Nous avons notamment aidé l’une d’entre elles qui a décidé de mettre à la disposition des femmes afrodescendantes son expérience personnelle et sa maîtrise de la science des ingrédients chimiques utilisés dans les produits capillaires et cosmétiques. Grâce à notre financement, l’entreprise de soins capillaires Blended Beauty distribue maintenant ses produits aux États-Unis et en Europe.
Quel avenir pour le fonds ? Est-il toujours pertinent ?
Je le dis souvent, et même si cela peut paraitre surprenant, je rêve du jour où nous n’aurons plus besoin de ce type de fonds pour aider les entrepreneurs issus des communautés noires à accéder à du financement. Cela voudra dire que peu importe ta communauté, l’égalité des chances d’accès sera assurée sans que ces entrepreneurs aient à travailler deux fois plus fort.
Pour le moment, le Fonds Afro-Entrepreneurs garde sa pertinence, car il y a toujours des problématiques d’accès au financement et à l’accompagnement. Nous souhaitons d’ailleurs accueillir prochainement de nouveaux partenaires pour nous permettre d’aider encore plus d’entrepreneurs.
Nous nous préparons à fêter les 15 ans du fonds le 20 avril prochain à l’occasion d’un gala de reconnaissance. Après toutes ces années à travailler avec les entrepreneurs des communautés noires du Québec, nous souhaitons les mettre à l’honneur et souligner leur contribution à la vie économique du Québec.